Eaupâle
Et bien oui, quatre jours sur la corde pendue à flanc de falaise entre la vie et la mer. Effectivement, c'est beau, l'océan ouvert, la mer étale, la majesté, l'éternité, toutes les déités mouillant leurs corps sveltes dans l'écume qui perle à fleur de rivage. Le grand bleu mousse à vue de sable, et ici haut perchés, l'oeil contemple la magnificience du paysage clair obscur, le grandiose découpage de la falaise, à temps long d'érosion, sculptures de vent et de marée contre la douceur du sable étalant ses charmes ocres où se perdent les eaux Ah bah, oui c'est joli. Et encore, je n'ai rien dit du soleil dardant son or, chauffant les corps, mirant son rouge, embrasant les sentiments. Mais ai-je besoin d'en parler ? Ai-je envie d'évoquer les beautés dont regorge le monde naturel quand nous avons pour loisir la misère des autres, quand nous jouons à la bohème face au cauchemar des migrants ? Face à la forteresse britannique, Albion, coeur du capital qui draine les forces humaines du monde entier, nous rafraîchissons nos routines trop confortables. Je mets en jeu pour trois nuits ma séculaire sécurité de logement, de sanitaire, de nourriture, et encore, avec le parachute de ma carte bancaire. Je me sens vivre. Quelle est donc cette part de mon être que je sens mourir ?
Heureusement que quelque part la raison me commande de ne pas comparer.